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Yoann Stuck, le phénomène trail

Yoann Stuck, le phénomène trail

Août 2010. Le presque trentenaire Yoann Stuck, plus fêtard que sportif, fume clope sur clope, enchaîne les soirées et pèse 95 kg. Sur un coup de tête, il décide d’arrêter de fumer. Se dit que s’il ne trouve pas de quoi compenser, il va vite dépasser le quintal. C’est le déclic. Il enfile un short et part courir. 20 minutes… de pur cauchemar ! Aujourd’hui, dix ans plus tard, Yoann est devenu… traileur professionnel ! Rencontre autour d’un parcours atypique.

Fast-portrait

  • Yoann Stuck
  • 38 ans, en couple
  • Vit à côté de Lyon
  • Est originaire d’un petit village du Vaucluse, Châteauneuf-de-Gadagne (84)
  • Papa d’une petite fille de 6 ans

 

Yoann Stuck sur la 6000D

Ton parcours est pour le moins atypique. Peux-tu nous dire comment tu t’es mis à la course à pied ?

J’ai décidé d’arrêté de fumer en août 2010, sur un coup de tête. À l’époque, je sors beaucoup en semaine, bois des pintes de whisky Coca et je fume plus d’un paquet de clopes par jour… Bref, j’ai une hygiène de vie déplorable, je totalise 95 kg. Je me dis alors que si je ne trouve pas quelque chose pour « compenser », je vais vite dépasser le quintal. Alors j’ai chaussé ma paire de speakers, un tee-shirt en coton et un short de foot, et puis je suis parti courir. 20 minutes. Un cauchemar. Mais j’y suis retourné, j’ai allongé la distance… Finalement, j’y ai pris du plaisir, rencontré des coureurs, … De fil en aiguille, je me suis inscrit à une première course, puis à un premier club d’athlétisme, pour finalement arriver là où j’en suis aujourd’hui.

Comment ton entourage a-t-il vécu ta transformation ?

Ça dépend qui 🙂 ! Ma compagne a vécu un peu la même « transformation » avec moi, donc on était sur la même longueur d’onde. Ma maman, plutôt bien, même si elle ne se rendait pas vraiment compte de l’importance de ce changement… Et puis pour les copains, tout le monde n’a pas vraiment compris au départ un tel revirement… Mais aujourd’hui, je suis super content d’aller courir avec les mêmes potes avec qui je me mettais des mines le week-end !

Comment as-tu pris le virage trail / outdoor ?

Au départ… en me perdant ! En fait, je venais d’emménager sur Lyon et comme je ne connaissais ni grand monde ni trop le coin, courir était aussi le moyen de visiter les alentours. Et le gros virage, ça a été mon premier trail en montagne, le Marathon du Mont-Blanc ! Je prends un plaisir immense à courir au milieu de toutes ces élites que je suis sur les réseaux. J’aime aussi l’ambiance vraiment sympa aux abords des sentiers et je passe la ligne d’arrivée avec ma compagne et des amis. Un moment intense ! L’un de mes meilleurs souvenirs. J’ai grandi à la campagne. Je jouais toujours dehors, avec la garrigue en terrain de jeu, donc j’ai toujours aimé être dehors.

Tu portes toujours une attention toute particulière à ton mode de vie / ta nutrition ? (sans pour autant sacrifier à la petite bière d’arrivée… 😉)

J’évolue toujours en ce sens. Je me rends compte – et je partais de très loin ! -, de l’importance de l’alimentation dans ma vie de sportif, mais pas que. Pour ma santé générale, aussi. Je me rends aussi compte de l’impact de notre consommation sur l’environnement donc oui, j’ai une hygiène alimentaire au quotidien qui est aujourd’hui plutôt très bonne, je pense. J’ai essayé le cétogène cet hiver, là, on teste un mois végétarien. Sinon, je suis plutôt un mode alimentaire low carb (soit, pauvre en glucides) qui me convient très bien… mais j’ai beaucoup de mal à refuser la bière et les petits plaisirs. C’est important aussi, je crois.

Yoann Stuck

Tu es très présent sur les réseaux sociaux, notamment à travers des web-séries. Peux-tu nous en dire plus ? Pour ta série Adaptation sur YouTube, l’épisode 3 est pour bientôt ?

L’épisode 3 de ma série Adaptation, on vient de le tourner le week-end dernier ! Avec le contexte sanitaire actuel et l’absence de courses, j’ai eu cette idée de proposer des petits défis, des challenges qui me tenaient à cœur. J’en fais partager certains avec le petit groupe d’entraînement que je suis, avec les copains… et puis d’autres, je les ferai seul, en totalité ou en partie.

On a donc fait un premier épisode sur un off de la SaintéLyon (course qui a dû être annulée cette année), pour mettre en avant les organisateurs de course.

Le suivant, c’était pour mettre en avant ma station de cœur, La Plagne, et les répercussions du COVID-19 sur les stations cet hiver.

Le week-end dernier, l’histoire était plus personnelle puisque je voulais mettre en avant l’endroit où j’ai grandi : Châteauneuf-de-Gadagne et le Vaucluse plus généralement, ainsi que ma ville d’adoption : Lyon. Car je suis devenu la personne que je suis aujourd’hui en partant vivre à Lyon. Mais je ne serai pas non plus la personne que je suis, sans avoir grandi dans mon village.

On est donc partis samedi matin dernier de Lyon jusqu’à Avignon en vélo, pour donner un côté responsable et écologique à l’aventure et arriver dans l’après-midi. Ensuite, j’ai enchaîné le Wings for Life (course caritative organisée par Red Bull pour la recherche sur la moelle épinière) sur une App en partant d’Avignon avec pour objectif d’aller jusqu’au sommet du Ventoux, et donc par la même occasion de faire un FKT : 62,34 km, 2136 m D+ en un peu plus de 5h. Et il semblerait que pour le Wings for Life, j’ai fait premier français avec 52,8 km.

Mais j’ai encore en tête pas mal d’idées d’épisodes, peut-être plus en montagne cet été.

Et tes capsules vidéo Hiit & Eat sur Instagram ?

Pareil, le COVID-19 et le premier confinement m’ont donné l’idée de départ de faire du home trainer en interviewant en live sur Instagram des acteurs touchés par ce contexte sanitaire peu évident… Mes partenaires ont joué le jeu, mais pas que ! Des restos, des stations de ski, des athlètes… L’idée était de tirer du positif d’une situation négative. Ensuite, j’ai proposé des renfos accessibles à tous pour rester actifs, même chez soi. Et puis m’est venue, dans la foulée, l’idée de préparer un petit truc en parallèle – car je ne suis pas un grand cuisinier – s’est imposée : on dit bien « Après l’effort, le réconfort », non ?!

Yoann Stuck - iamwoodstuck

Ta journée-type ?

Je m’entraîne quasi 7j/7, parfois en biquotidien. Après, tout dépend des périodes de charges et des échéances à venir. 

Lever 7 h : Petit-déjeuner en famille. Je bosse toute la matinée après avoir amené ma fille à l’école. Je pars souvent faire ma première séance en fin de matinée et l’on déjeune aussi en famille. Je travaille l’après-midi jusque 16 h, puis seconde séance. Je re-travaille encore jusqu’au dîner. J’ai la chance de pouvoir m’organiser comme je veux car je travaille de la maison, mais, la contrepartie c’est qu’il n’y a jamais vraiment de coupure, pas de week-end ou de réelles vacances… Mon ordinateur et mon téléphone ne me quittent pas souvent… mais quand on aime son job, on ne travaille pas vraiment, si ?!

La course à pied, c’est pour toi un précieux outil de partage, non ?

Au départ, c’était surtout ma bulle, ma méditation, là où je trouvais mes meilleures idées. Et j’ai vu que les gens, autour de moi, se retrouvaient dans ce que je faisais, ce qui est vraiment top. Donc oui, c’est un bel outil de partage, tout comme les réseaux, même s’ils sont souvent critiqués.

Tes prochains projets et/ou objectifs et/ou dossards que tu vas épingler ?

J’adorerais pouvoir remettre un dossard pour le Marathon du Mont-Blanc mais je ne suis pas certain de ce qu’on aura le droit de faire ou non fin juin.
Sinon, je mets normalement deux dossards mais sur mon Gravel puisque je vais prendre le départ du Vélo Vert Festival à Villard de Lans début juin et du Festival Outdoor de la vallée verte à Chambon-sur-Lac, en Auvergne, fin juin. J’ai, depuis longtemps, très envie de mettre des dossards en vélo et j’ai eu un vrai coup de cœur pour le Gravel. Ce dernier va beaucoup se développer en France dans les prochaines années !

Ton rêve fou ?

Je souhaite m’orienter sur de la montagne pure. Le « toit du monde » me fait envie. Je souhaite surtout découvrir de nouvelles sensations et me sentir libre. Relier d’est en ouest les États-Unis avec mon Gravel serait aussi un beau projet… 

Un dernier message que tu aimerais adresser aux lecteurs du blog ?

Inspirez-vous des reportages du blog et allez prendre de la hauteur !

🏃‍♀ Pour en savoir plus sur Yoann :

www.anotherlife.fr

www.instagram.com/yoannstuck

FKT : Au-delà des records, l’art de courir en montagne

FKT : Au-delà des records, l’art de courir en montagne

Plongée à grandes foulées dans les coulisses du film FKT, une véritable prouesse technique et physique que l’on doit au photographe Brice Ferré, installé depuis 2009 à Vancouver (Canada). Rencontre avec cet infatigable créateur d’images qui suit ici l’athlète trail Jeanelle Hazlett dans sa tentative de record « Fastest Known Time » au Mont Brunswick, un sommet vertigineux niché au cœur de la Colombie Britannique. À vos marques, prêts, partez… Interview avec Brice Ferré !

Brice Ferré : l’homme qui ne court jamais seul

Brice Ferré est un photographe-réalisateur qui, tout fraîchement diplômé d’une école de cinéma en 2003, entame une carrière à Paris. Assistant-monteur sur le film-événement La Marche de l’Empereur, il suit ensuite son rêve en déménageant en 2009 à Vancouver, au Canada. Son leitmotiv ? Courir la montagne et faire des images. Brice ne court jamais seul. Il a toujours son appareil photo, un Reflex numérique, en main. Histoire de ne rien rater de ce que les sentiers, la nature et l’aventure peuvent, généreusement, lui offrir.

Brice Ferré

Tes premiers pas dans le monde du trail ?

J’ai commencé la course à pied en 2011, puis le trail en 2013. Ma première course, c’était un marathon en trail en 2014 (Hallows Eve 42km à North Vancouver) et puis je suis passé aux ultras en 2015, en faisant le Diez Vista 50K et le Squamish 50. Durant les 6 dernières années, j’ai couru une vingtaine d’ultras, dont trois 50 miles (80 km). J’adore passer entre 5 et 12 heures à courir et souffrir, en essayant de pousser mon corps à ses limites. Le trail m’apporte des sensations uniques que je n’ai encore trouvé nulle part ailleurs. Grâce à mon travail de photographe-réalisateur outdoor, je passe beaucoup de temps en montagne. Et tout mon temps libre, je les passe aussi sur les sentiers !

Comment as-tu rencontré Jeanelle Hazlett ?

J’ai rencontré Jeanelle Hazlett en mars 2017 quand le « Salomon Vancouver Trail Lab », un groupe de course à pied organisé par Salomon Vancouver et dont je suis l’un des leaders, a organisé un entraînement avec le groupe « PNWT » (Pacific Northwest Trail Runners) créé par Jeanelle.

Comment est né le projet du film FKT ?

Jeanelle est une coureuse incroyable ! Elle a passé les 3 dernières années à dominer toutes les courses qu’elle a couru. Elle et moi, adorons courir sur des terrains très techniques. Jeanelle est toujours à la recherche de nouveaux challenges, donc le jour où elle m’a dit vouloir tenter le FKT du Mont Brunswick (13km et 1560m de D+), cela m’a paru évident : il me fallait faire un film autour de sa tentative.

Comment avez-vous justement géré le risque et la peur face à cette arête finale absolument vertigineuse où toute chute est fatale ?

Le danger est toujours présent lorsque l’on fait ce genre de performance dans ce type d’endroit. Nous en sommes toujours conscients. Nous ne sous-estimons jamais la montagne et ses dangers, et partons toujours avec de quoi passer la nuit ou bien attendre les secours si jamais nous nous cassons quelque-chose (nourriture, vêtement en plus, safety kit). Nous avons toujours quelqu’un qui connaît le plan de notre journée, afin de venir nous chercher si jamais nous ne rentrons pas le soir.

Quant à la peur, il n’y en a pas. Jeanelle et moi sommes extrêmement habitués à ce genre de terrain. Nous avons passé des centaines d’heures à courir en montagne dans différentes situations (météo, températures, fatigue …). Nous faisons confiance à notre entraînement, à notre matériel et respectons la montagne et ses dangers. Nous n’irions jamais sur une telle arête si nous n’étions pas sûrs à 100% que tout est sous contrôle. Ni Jeanelle, ni moi, avons le vertige. Ce qui est un réel bonus pour ce genre de situations, car nous avons vu beaucoup de gens passer à quatre pattes sur Brunswick, parfois-même ils sont complètement pétrifiés. Car effectivement… c’est raide ! [Sourire]

Jeanelle et Brice - by Brice Ferre Studio

Depuis sa création dans les années 2000, l’organisation américaine FKT (pour Fastest Known Time) répertorie les segments de course remarquables à travers le monde ainsi que les athlètes ayant réalisé les meilleurs temps de parcours. Le concept n’a jamais été aussi populaire que depuis l’annulation de nombreuses courses dues à la pandémie de Covid-19 ! Depuis 2020, on a effectivement vu fleurir de nombreuses tentatives de FKT sur pléthore de sentiers aux États-Unis, mais aussi en France et par-delà le monde… Que penses-tu de ce phénomène ? 

Je trouve cela formidable ! J’adore voir des athlètes d’exception repousser leurs limites afin d’établir des records. C’est une source d’inspiration incroyable.

Si le phénomène FKT invite les gens à sortir de chez eux et courir en montagne, alors, je suis entièrement pour ! Tant que c’est fait dans le respect des sentiers, de la montagne (« leave no trace ») et sans mettre en danger qui que ce soit (y compris la vie des sauveteurs qui doivent venir nous chercher si l’on se casse une cheville ou un genou…).

À ton avis, c’est un épiphénomène ou une tendance qui va s’inscrire dans la durée et s’affirmer de plus en plus ?

Les humains sont compétitifs par nature, et établir des records de « quoi que ce soit » existe depuis la nuit des temps. Je pense que les FKT vont juste être de plus en plus fréquents car ils sont maintenant filmés et rendus officiels par un site Internet dédié. Mais le concept du FKT a toujours été présent. C’est juste que la partie « known » était plus confidentielle avant le site Internet et les belles vidéos YouTube.

Le nouveau temps de référence femme pour le FKT sur la Brunswick Mountain date de l’été 2020 avec la performance de Katherine Short en 2h21m39s. Sais-tu si Jeanelle compte reprendre le record ?

Oui, je pense qu’elle va y retourner un de ces jours. Katherine est une coureuse incroyable qui est descendue plus vite que Jeanelle, mais qui est montée moins vite. Donc je pense que si Jeanelle se lâche encore un peu plus sur la descente (et ne se filme pas avec son téléphone sur le sommet 😊), ça devrait le faire, car le nouveau record est à peine à une minute d’écart. En tout cas, c’est sympa de voir cette compétition entre coureur/ses, ici. On est tous copains, c’est fun d’essayer de se dépasser les uns et les autres.

Ton film donne envie de suivre Jeanelle dans une aventure plus longue… Un futur projet sous la semelle ?

Oui. Nous travaillons actuellement sur un film plus long, autour d’un FKT plus long (56 km) dans les Rocheuses !

Le mot de l’athlète

« Je connais les FKT depuis longtemps. C’est quelque chose qui m’a toujours fascinée parce que ça oblige à se surpasser. On est seul face à la montagne. À la différence d’une course, on ne poursuit personne. Personne ne nous poursuit. On peut s’arrêter quand on veut, ou ralentir. Mais c’est soi-même contre la montre. Donc ce projet a été l’occasion de me forcer à travailler dur pour améliorer mes chronos et repousser mes limites sans rendre de comptes à personne d’autre qu’à moi-même »

Jeanelle Hazlett

 

Le mot du réalisateur

🎥 Pour en savoir plus sur le réalisateur Brice Ferré :

www.briceferre.com

www.instagram.com/briceferre

www.briceferre.com/youtube

🏃‍♀ Deux autres films réalisés par Brice sur Jeanelle Hazlett :

http://www.briceferre.com/limitless

http://www.briceferre.com/jeanelle

🎬 Retrouvez le film FKT dans le programme blanc du meilleur du Festival de Banff sur Bonne Projection jusqu’au 18 avril 2021

 

Jeanelle Hazlett - FKT on Brusnwick - by Brice Ferre Studio

Imagine, un autre FKT

C’est un tout autre décor et une toute autre ambiance avec le film Imagine qui revient aussi sur un FKT (« fastest known time »), une tentative réalisée par le jeune athlète indien, Kieren D’Souza pour un film rare et inédit, tourné en noir & blanc, signé du réalisateur Prashant Bhatt.

Le jeune Kieren rêve depuis des années, de décrocher un record de vitesse (« FKT ») pour inciter ses compatriotes à découvrir le trail running et la montagne autrement. Loin de l’animation des grandes courses européennes, Kieren choisit l’ascension du mont Friendship (5 289 m), un sommet qu’il aperçoit de Manali, sa ville natale, pour un parcours de 53 km au coeur de l’Himalaya. Seul, en pleine pandémie mondiale, le jeune coureur se lance…

Imagine
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