Renan Ozturk : Derrière le réalisateur, un alpiniste et un artiste

Renan Ozturk : Derrière le réalisateur, un alpiniste et un artiste

Amoureux de l’Himalaya et de son peuple, grimpeur pro et alpiniste de haut niveau, Renan Ozturk conjugue talent et créativité des deux côtés de la caméra. L’escalade, l’alpinisme et les rencontres restent les moteurs de ses nombreux voyages.

C’est l’escalade qui mettra Renan Ozturk sur la route de l’aventure, en 2002. Avec une bande de grimpeurs nomades, les « Stone Monkeys », qui vivent dans leur voiture ou en plein air avec rien, il sillonne pendant six ans les big walls et tout ce qui se grimpe du Yosemite à Indian Creek en passant par les sommets de Colombie-Britannique.

Ces paysages magnifiques qu’il découvre et admire autour de lui, Renan a envie de les peindre. Avec une signature très personnelle. Ses tableaux spectaculaires, lumineux et colorés, expriment sur la toile une créativité hors-norme.

Pendant ces années d’itinérance, poussé à la découverte du monde par un vent de liberté, le grimpeur nomade peint les jours de repos, mais ne garde rien. Il donne ses toiles aux personnes qui l’hébergent au gré de ses vagabondages… Au fil de ses rencontres, son envie de raconter et de partager se fait plus forte. Le degré de cotation ne suffit plus. Le pinceau, non plus. Les voyages deviennent tournages. Pour Renan, ces expéditions et ces aventures, c’est ce qui rend la vie sympa et c’est ce qui alimente la créativité. Il en a fait un art… de vivre.

Renan Ozturk by Renan Ozturk

« Meru », une première mythique

Renan Ozturk possède une liste impressionnante d’ascensions techniques et difficiles. Athlète pro pour The North Face, il a signé des premières de légende comme celle du mont Meru. Particulièrement esthétique, ce sommet a été l’un des plus convoités de l’Himalaya, objet d’un grand nombre de tentatives couronnées d’échec. C’est ce majestueux rebelle que Renan Ozturk est allé tenter à son tour avec Conrad Anker et Jimmy Chin. Et réussir.

Une ascension qui, au-delà de la performance historique de toute « première », constitue une leçon de persévérance et de courage. En effet, lors de la première tentative en 2008, la cordée renonce à 100 mètres du sommet dans des conditions dantesques. Peu avant la seconde tentative, Renan passe tout près de la mort dans un terrible accident, et quasiment au même moment, Jimmy Chin manque lui aussi de succomber dans une avalanche. Mais pas question de renoncer au projet. Renan consacrera plusieurs mois à une rééducation intensive pour retrouver la condition physique qui lui permettra de retourner en Himalaya avec ses amis en 2011, au pied du mont Meru. Ils seront les trois premiers hommes à atteindre le sommet à 6 660 m par la voie du « Shark Fin » (l’Aileron de requin) réputée parmi les plus dangereuses de l’Himalaya, en raison de sa difficulté technique.

L’aventure sortira en images en 2015 dans le film Meru. Le documentaire, abondamment primé, plonge le spectateur au cœur de l’expédition et des destins troublés des trois protagonistes, liés par une profonde amitié. Fait peu banal, Renan Ozturk est des deux côtés de la caméra, piolet en main dans la cordée des trois alpinistes qui signent cette première historique, et derrière l’écran comme directeur de la photographie.

Renan Ozturk - Meru - www.renanozturk.com

L’Himalaya, leçon de vie

Renan est depuis longtemps amoureux de l’Himalaya, attiré non seulement par ses parois d’ampleur et sommets sauvages à gravir, mais aussi par son peuple dont la culture, imprégnée de haute altitude, est unique au monde. Cette composante humaine de l’aventure, Renan l’a découverte il y a vingt ans lors d’un programme d’études à l’étranger qui l’amène au Népal. En immersion dans une famille locale qui ne parle pas un mot d’anglais, il vit pendant huit mois une expérience riche d’enseignements, aux antipodes de sa culture américaine. Ce séjour changera radicalement son rapport à la montagne et marquera pour toujours son approche de réalisateur. Au lieu de se ruer sur les sommets, il devient essentiel pour lui de passer du temps dans ces « bulles d’humanité profonde » qui donnent tant en retour pour peu que l’on prenne le temps de saisir leur fragilité. Au réalisateur ensuite de trouver le bon angle pour révéler cette perspective et raconter avec justesse.

Renan Ozturk - The Last Honey Hunter - National Geographic

« The last honey hunter », un témoignage émouvant

L’œil derrière le viseur, Renan Ozturk est donc aussi réalisateur. Il est l’un des co-fondateurs de la société de production américaine Camp4 Collective, qui a su convaincre des clients aussi exigeants que Nike, Google ou Apple. Passionné d’image sous toutes ses formes, il est également photoreporter, notamment pour le prestigieux National Geographic, média de référence dans la science et l’exploration.

Renan aime raconter des destins hors du commun, mettre en images ce que l’humanité a de plus extraordinaire et admirable. Par ces récits en images, il veut aussi sensibiliser et révéler au monde ce qu’il a de plus vulnérable pour promouvoir un changement de société. La signature Renan Ozturk ? Raconter des histoires vraies dans des endroits réels, avec de gros moyens sans rien perdre pour autant de l’authenticité du sujet.

« The Last Honey Hunter », reportage réalisé en 2017 dans la vallée de Hongu au Népal, unanimement primé, s’inscrit dans cette démarche de témoignage vibrant. Les images de ce Népalais accroché à une échelle en corde de bambou surgissant des brumes comme par enchantement, défiant le vide pour attraper les galettes de miel hallucinogène dangereusement gardées par d’énormes abeilles, ont fait le tour du monde. Les images du dernier chasseur de miel du peuple Kulung…

Renan Ozturk - www.renanozturk.com

Renan Ozturk a derrière lui vingt ans d’aventures, d’images à couper le souffle, d’histoires touchantes glanées au gré de ses voyages. Il continue à peindre sur des toiles déroulées à même le sol, depuis les camps de base de ses expéditions. Du solo intégral aux tableaux multicolores, des cultures venues du fond des âges aux plus durs sommets de l’Himalaya, Renan Ozturk, l’alpiniste-artiste aux multiples talents, n’a pas fini de nous faire rêver.

🔎 Son site Internet : https://www.renanozturk.com

🏆 2013 – Aventurier de l’année, Prix National Geographic

🎥 Ses films :

The Ghosts Above

Mountain, 2017

The Last Honey Hunter, 2017

Meru, 2015

Sherpa, 2015

Down to nothing, 2015

🗻 Ses ascensions remarquables :

Première ascension du mont Meru, Himalaya, par la voie Shark’s Fin

“Freerider“, El Cap, Yosemite (7c+, 900 mètres) en libre

Première ascension face sud-ouest Cat Ear Spire, tours Trango, Himalaya, Pakistan

Première ascension face sud-ouest Buttress of Tawoche, Khumbu, Himalaya, Népal

📌 Liste complète sur :

https://www.blackdiamondequipment.com/en_US/ambassadors/renan-ozturk

🎨 Sa peinture :

https://www.youtube.com/watch?v=QGXDT6RU3AI

Nims Dai : le nouveau phénomène de l’alpinisme

Nims Dai : le nouveau phénomène de l’alpinisme

Depuis son ascension-événement du K2 cet hiver, sans oxygène, le nom de l’alpiniste népalais Nirmal Purja, alias Nims Dai, fait la une des médias du monde entier. Rencontre avec le nouveau phénomène de l’himalayisme !

Nims, l’homme de tous les records

Une trentaine d’années et déjà plusieurs vies. Le CV de l’alpiniste népalais Nirmal Purja, plus connu sous le nom de Nims Dai (« Dai » est une appellation familière au Népal, traduisible par « garçon » ou « gars »), est bien trop long pour être ici décrit. L’homme est un phénomène. Sur les sentiers de l’Himalaya comme sur les réseaux sociaux, qu’il occupe généreusement. Cet ancien soldat des forces spéciales britanniques, répondant au doux diminutif de Nims pour les initiés, semble se nourrir de toutes les expériences. Un physique hyper affûté, une équipe ultra rôdée et une force mentale inébranlable pour faire la différence. Et une soif de vivre, sans limites. Emportant avec lui toute une nation, le Népal, pas peu fière de son enfant prodige. Avec Nims, rien ne semble impossible…

@nimsdai

14x8000m en 6 mois et 6 jours

Nous sommes en octobre 2019 quand l’alpiniste népalais réussit son pari fou, jugé irréalisable par beaucoup, le « Possible Project » : gravir les quatorze plus hauts sommets de la planète en moins de sept mois, alors que le précédent record (détenu par le Coréen Kim Chang-Ho) était donné en sept… ans, 10 mois et 6 jours ! Déjà adulé au Népal et en Asie, l’ancien des forces spéciales britanniques éclot alors aux yeux du monde : ce nouveau record planétaire au compteur, Nims entre dans l’histoire de l’alpinisme et attire définitivement la lumière. L’aura de ce nouveau sprinteur des cimes grandit, expé après expé. Mais son utilisation de l’hélico pour se rendre sur les camps de base et l’usage de l’oxygène sur les expés nourrissent encore les débats au cœur du sérail montagnard. Quand bien même, Nims embrasse un nouveau rêve : être le premier alpiniste à réaliser l’hivernale du K2… sans oxygène, cette fois…  Du jamais vu.

@nimsdai

Objectif K2 réussi !

Là encore, Nims, qui n’entre « en compétition avec personne d’autre qu’avec lui-même », déjoue tous les pronostics. Le 16 janvier dernier, la nouvelle tombe. Et les bras de nombreux himalayistes par-delà la planète, avec : entouré d’une dizaine de Népalais, Nims vient de réussir la première ascension hivernale du K2 (8611m), le deuxième plus haut sommet du monde. Cerise sur le sac à dos, lui (et lui seul) l’a gravi sans oxygène. L’Hivernale du K2 sans ox ?! Craaaazy. Bien sûr, comme l’a fait judicieusement remarquer l’ultra-traileur Kilian Jornet, Nims a profité du travail de ses compagnons de cordée qui ont installé les cordes fixes sous oxygène. Mais le moment est historique : Nims vient ici de signer un nouveau coup de maître. Même la « montagne sauvage » n’aura pas résisté au sourire solaire de l’ancien Gurkha. Et si ce n’était que le début…

🗻 Pour en savoir plus :

https://www.nimsdai.com/

🔎 Article autour du « Possible Project » (14x8000m) :

Article paru sur Montagnes Mag